Depuis quelque temps, je m’interroge sérieusement sur la place que les applications américaines occupent dans mon quotidien numérique. Cette réflexion s’est imposée face aux récents bouleversements politiques aux États-Unis, où la séparation des pouvoirs semble vaciller et où les garanties fondamentales concernant la confidentialité et la sécurité des données sont de plus en plus fragilisées.
L’absence de contre-pouvoirs internes efficaces et la confusion croissante entre les sphères exécutives et judiciaires compromettent la confiance que l’on peut accorder aux entreprises soumises aux lois américaines. Le Cloud Act, en vigueur depuis 2018, en est un exemple frappant : il permet aux autorités américaines d’exiger l’accès à des données, même si celles-ci sont hébergées hors des États-Unis. Cela place de nombreuses entreprises dans des situations délicates concernant la confidentialité des données de leurs utilisateurs.
Au-delà de ces considérations techniques, c’est aussi une question idéologique. Avec la résurgence de courants politiques conservateurs et la montée en puissance de figures controversées telles qu’Elon Musk ou Mark Zuckerberg, qui exercent une influence disproportionnée sur l’espace numérique, les garanties de sécurité et de neutralité des plateformes deviennent incertaines. La question n’est plus de savoir si nos données peuvent être utilisées à des fins économiques ou politiques, mais bien qu’est-ce qui les empêche réellement de l’être ?
Je refuse de continuer à financer, même indirectement, des entreprises qui paient leurs impôts dans un pays où le gouvernement tend vers l’autoritarisme, remet en cause les droits des minorités et restreint l’autonomie des femmes. Le modèle politique et sociétal que les États-Unis semblent emprunter va à l’encontre des valeurs fondamentales auxquelles je tiens : égalité, respect des droits humains et souveraineté des individus.
Face à ces constats, j’ai décidé de bannir, autant que possible, les applications d’origine américaine de mes outils quotidiens. Mon objectif est de privilégier des alternatives européennes, et si possible suisses, qui respectent des normes plus strictes en matière de protection des données et dont les valeurs sont davantage alignées avec les miennes.
Cela dit, certaines contraintes subsistent : macOS et iOS restent au cœur de mon écosystème numérique, et il est difficile de s’en passer sans compromettre mon efficacité et ma productivité. Mais pour tout le reste, je compte bien m’émanciper autant que possible des géants américains.
Il s’agit donc d’un choix à la fois éthique et pragmatique : préserver mes données tout en refusant de soutenir un système dont les dérives deviennent de plus en plus préoccupantes.
Voici les services que je quitte, et leurs alternatives :
- WhatsApp → remplacé par Threema
- Gmail → remplacé par Infomaniak Mail
- Microsoft Office → remplacé par OnlyOffice
- 1Password → remplacé par Proton Pass
Threema remplace WhatsApp
Threema est une messagerie chiffrée de bout en bout, développée par une entreprise suisse basée à Pfäffikon. Elle est soumise au droit suisse en matière de protection des données, réputé parmi les plus stricts au monde. Les serveurs sont situés en Suisse et ne conservent pas les messages : une fois ceux-ci livrés à leur destinataire, ils sont automatiquement supprimés.
L’application est payante (paiement unique de 5.95 CHF) et disponible sur Android et iOS . Une application mobile est nécessaire pour activer les versions desktop (Windows, macOS et Linux) qui sont gratuites.
Pourquoi ce choix ? Contrairement à WhatsApp (propriété de Meta et donc de Mark Zuckerberg), Threema ne collecte pas de données personnelles inutiles et ne nécessite même pas de numéro de téléphone pour s’inscrire. C’est une véritable alternative axée sur la confidentialité.
Infomaniak remplace Gmail
J’utilise déjà une adresse gratuite en @etik.com ainsi que plusieurs comptes liés à mes sites web, tous hébergés chez Infomaniak depuis plusieurs années. Cette société genevoise, active depuis 1994, s’est engagée dès 2020 à offrir des alternatives crédibles aux services des GAFAM.
Infomaniak se distingue par une politique stricte de respect des données privées, une empreinte carbone réduite et un modèle économique transparent. La suite kSuite propose une messagerie complète avec calendrier, contacts et espace de stockage cloud (kDrive).
Je finalise actuellement ma transition vers Infomaniak et prévois de supprimer définitivement mon compte Google et tous les services associés.
Pourquoi ce choix ? Infomaniak est une entreprise indépendante, soumise au droit suisse. Elle garantit que vos données restent en Suisse et ne sont pas revendues à des tiers.
OnlyOffice remplace Microsoft Office
OnlyOffice est une suite bureautique complète (traitement de texte, tableur, présentations) développée initialement par Ascensio System SIA en Lettonie, désormais contrôlée par Ascensio System Ltd (Royaume-Uni) et OnlyOffice Capital Group Pte. (Singapour). Malgré cette structure complexe, OnlyOffice reste une alternative crédible à Microsoft Office, avec l’avantage d’offrir des versions desktops et auto-hebergés.
Infomaniak intègre également OnlyOffice dans sa suite kDrive, permettant de collaborer sur des documents sans exposer les données à des serveurs tiers.
Pourquoi ce choix ? OnlyOffice offre un haut niveau de compatibilité avec les formats Microsoft (DOCX, XLSX, PPTX) tout en permettant une utilisation totalement hors ligne ou sur des serveurs de confiance.
Proton Pass remplace 1Password
Bien que 1Password soit développé et commercialisé par une société canadienne, je préfère ici soutenir une entreprise européenne, voire suisse. Proton Pass est le gestionnaire de mots de passe développé par Proton AG, société basée à Plan-les-Ouates (canton de Genève) et fondée par d’anciens chercheurs du CERN. La même entreprise est à l’origine de ProtonMail, ProtonVPN et ProtonDrive, tous réputés pour leur haut niveau de sécurité et leur engagement en faveur de la confidentialité.
Proton Pass propose un chiffrement de bout en bout et bénéficie des mêmes garanties légales suisses que les autres produits Proton. L’écosystème est cohérent et permet une gestion centralisée des services.
Pourquoi ce choix ? En plus d’être plus abordable que 1Password, Proton Pass bénéficie de l’expertise de Proton AG en matière de sécurité et respecte les normes suisses strictes en matière de protection des données.
Le cas de l’hébergement Cloud des données
Je n’évoque pas Google Drive ou OneDrive dans ma transition car pour ces services, celle-ci est déjà réalisée depuis plusieurs années. Après avoir testé Kdrive et pCloud , j’avais retenu cette dernière solution pour des aspects pratiques en particulier au niveau de la synchronisation et de l’interface; peut-être faudrait-il prochainement que je redonne une chance à Kdrive ?
pCloud est une société suisse basée à Zoug, et bien que leurs serveurs soient situés au Luxembourg, leur juridiction reste soumise aux régulations européennes (RGPD), ce qui assure un certain niveau de protection des données.
Quelques réflexions en guise de conclusion
Changer d’outils numériques n’est pas anodin : cela demande du temps, des ajustements et parfois des compromis. Mais il me semble aujourd’hui essentiel de reprendre le contrôle sur mes données et de ne pas cautionner des entreprises ou des gouvernements dont les pratiques vont à l’encontre de mes valeurs.
Ce changement n’est pas un rejet de la technologie américaine en soi, mais une démarche de cohérence entre mes convictions personnelles et mes usages numériques. Il existe des alternatives fiables et respectueuses — souvent méconnues — qui méritent qu’on leur accorde une chance.
Si vous envisagez un chemin similaire n’hésitez pas à consulter le site European alternatives fot digital products qui recence de nombreux autre type de service pour lesquels une transition est possible ou si vous avez des questions sur les outils que j’utilise, à me contacter.